Hey hey yopla boum boum bam dans la caravane!
Salut la jeunesse, juste un petit message (en faite je sais pas encore) pour signaler
que tout va bien sur le domaine paraguayen.
Bon je vais pas repasser par la description de mon boulot ici, ça a pas trop changé depuis le dernier message, mon mandat reste le même. Ce qui a changé, c'est que j'ai avancé dans mes démarches, et là ca devient intéressant.
J'ai suis donc retourné une deuxième fois dans le Chaco. Mais cette fois à Cuyabia, la deuxième communauté dont je parle dans mon premier message. Cuyabia c'est...autre chose. Pas de maison, pas d'eau, et encore moins d'électricité. J'y suis donc allé 2 jours avec l'équipe d'Alter Vida pour y faire de l'"observation". Donc ce que je peux dire rapidement des deux communautés dont je dois établir le bilan alimentaire :
- Pykasu --> "vieille" communauté guarani ñandeva d'une trentaine d'années, grand territoire de chasse, les gens sont bien installés, depuis un projet de développement l'an passé, ils ont commencé à faire de l'agriculture. Ce qui diversifie grandement les habitudes alimentaires (ils sont passé de viande et fruits à viande, fruits sauvages et de culture, légumes, céréales...). Aujourd'hui c'est comme un petit paradis, les habitants sont super peace, réservés toutefois, ils ont leurs petites habitudes, bref...tout va bien, mais pas tout quand même (je reviendrais là dessus).
- Cuyabia --> nouvelle communauté ayoreo de moins d'un an. En faite la plupart viennent d'une communauté, plus...urbanisée (qui s'appelle Évétogué). Cette dernière est malheureusement victime d'une histoire classique chez les communautés indiennes du Paraguay. Proche de Filadelfia ("grande" ville du Chaco, majorité de mennonites, vieille colonie allemande qui contrôle la région grâce à son sens des affaires, et aux "titres de propriétés" qu'ils détiennent) et entourée de grosses exploitations. Ces exploitations sont tenues, bien-sûr par des mennonites qui "achètent" du charbon aux indiens d'Évétogué. Ce charbon, il est acheté pour une misère, à peine de quoi vivre, mais les indiens n'ont plus le choix, ils sont rendus dépendants de cette source de monnaie, parce que l'autonomie, c'est à oublier puisqu'il n'y a presque plus de forêt pour chasser (tout a été "carbonisé")... Une sale histoire, dont la seule sortie c'est : changer de communauté. Donc direction Cuyabia, vieille terre ancestrale, qui a été a moitié vendue par d'anciens leaders indiens qui, à l'époque, s'en sont mis pleins les poches au détriment du reste de leur communauté... Bref, aujourd'hui, ces terres ancestrales sont salement amputées, mais il en reste un bout. Une vingtaine de familles ont donc décidé de "revenir aux sources" pour occuper les derniers bouts de terrains qui leur restait. Les indiens de Cuyabia sont donc bien moins stables que ceux de Pykasu (pas de maison, d'eau, d'électricité, de lit, rien!), mais ils petit à petit ils s'installent. Ils sont aussi bien plus sociables que ceux de Pykasu. Pourquoi? À mon avis, l'effet récent de la proximité avec une "grande ville" fait qu'ils ne sont pas éberlués de voir un blanc (ou paraguayo) leur parler.
Ca c'était pour la partie "observation". Durant 3 semaine à Asuncion, j'ai donc préparé des questionnaires pour les habitants de ces deux communautés, pour connaître, justement, leurs habitudes alimentaires et organisation de leur communauté. Ce qui est chose faite. On peut difficilement faire plus intéressant comme expérience. Ces questionnaires m'ont permis de voir un peu de l'intérieur à quoi ressemblait la vie indienne. À Cuyabia, je n'ai fait un questionnaire que pour le leader (c'est tellement petit que j'estimait qu'il pouvait facilement répondre à toutes les questions concernant les autres habitants). À Pykasu, j'ai préparé un questionnaire pour les leaders et pour chaque maison.
Bizarrement, c'était bien plus difficile de m'entretenir avec le leader de Cuyabia qu'avec celui de Pykasu. Pourquoi? Sûrement parce qu'on parlait en espagnol avec Unine (leader de Cuyabia, dont la langue maternelle est l'ayoreo), et qu'à Pykasu, j'avais un interprète qui parlait guarani. Aussi, l,Interprète en question travaille depuis longtemps dans la communauté de Pykasu, donc le leader savait à qui il parlait, moins de gêne...
J'ai passé le questionnaire dans 25 maisons sur 50 (à Pykasu), ce qui est suffisant au final, parce qu'à chaque maison, toutes les réponses étaient ID-EN-TIQUES. C'est fou le poids d'une culture commune des fois. En même temps, ils ont pas 36 solutions pour s'en sortir (et oui, on est loin du choix illimité que nous propose un supermarché!).
Qu'est ce que j'en tire de tout ca... Beaucoup de choses, et je pense que j'ai pas encore assez de recul pour comprendre totalement ce que j'ai vu. Je peux pas tout expliquer ici, parce que ca tient du discours politique plus qu'autre chose. En deux mots : je suis encore plus convaincu que les projets de développement style "on apporte une nouvelle source d'énergie dans une communauté" est plus néfaste qu'autre chose. C'est les savoir traditionnels qui sont directement menacés... Ce qui est déjà observable à Pykasu.
Fort heureusement pour ma conscience, je participe à un projet de "maintien" de la forêt environnante de ces deux communautés en valorisant les savoir traditionnels indiens (pas besoin d'un diplôme pour maintenir une forêt en vie, les indiens eux, ils y vivent depuis des millénaires...).
Je m'arrête là, place aux photos. Je pourrais écrire un roman, mais vu que vous avez déjà sauté au moins 3 paragraphes, je préfère me taire ;)
Un petit flo de Pykasu ;)
Sortie de la salle de réunion à Pykasu
Victor, collègue de boulot, bon vivant, même embourbés depuis des heures, il garde le sourire ;)